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Paris, le 8 Avril 2021
Les propos et tribunes de certain.e.s psychanalystes concernant les enfants aux prises avec les questions de genre et/ou de transidentité semblent exprimer, une fois de plus, des prises de positions dogmatiques, comme l’on a pu l'entendre lors des débats sur le mariage pour tous, la PMA ou la GPA, semblant parler au nom de toute la psychanalyse.
Or la psychanalyse n’est pas une, elle est plurielle et singulière.
Mais ces propos et ces tribunes esquivent-ils la possibilité d’élaborer une autre dimension symbolique et imaginaire, dans laquelle la binarité de genre s’éprouverait autrement que par le sexe anatomique ?
La psychanalyse fondée sur les travaux de Jacques Lacan à la suite de ceux de Freud procède avant tout d’un travail individuel de nomination et non de recherche d’une norme, qu’elle soit sociale, d’orientation sexuelle ou d’assignation à un sexe anatomique. Elle se situe au-delà de l’anatomie et de l’inscription sexuelle qui peut se faire du côté masculin ou féminin ou pas.
Elle pose la question du désir du sujet et ne formule pas de jugements ou de conseils sur les différentes modalités de sa jouissance.
C’est dans une position d’écoute qu’elle fait son travail au mieux, au sein de l’espace extra-territorial de son cabinet.
Ces tribunes et ces propos, mettant en garde et prenant position, a priori, contre des avancées sociétales issues des combats féministes ou LGBTQI+ dans les médias, sont dommageables pour la psychanalyse, car à force de vouloir refuser les nouveaux possibles sociétaux, notre pratique risque de se refermer sur elle même.
Freud n’a jamais voulu faire de la psychanalyse une religion.
Les psychanalystes qui s’expriment dans les médias et dans les tribunes reçoivent-ils ces enfants qui sont en questionnement sur leur identité ou leur genre ? Si ce n’est pas le cas, c’est dommageable car ces enfants leur apprendraient à les écouter autrement et à questionner ce qui, dans la théorie psychanalytique, semble intangible pour eux.
La récente tribune de Mediapart « D’abord, ne pas nuire, pour un accompagnement bienveillant et informé des mineur.e.s transgenres » signée par un collectif de psychologues, psychanalystes, psychiatres et de chercheurs universitaires, a pointé très justement, l’impérieuse nécessité d’accompagner les sujets vers un parcours de transition, quand ceux-ci en font la demande, dès leur plus jeune âge en prenant le temps nécessaire de l’adaptation au désir de l’enfant qui pourrait changer, ou non, au cours des années de suivi psychologique.
Il est facile de s’offusquer en contestant la maturité de l’enfant, le risque qu’il regrette ce choix, l’insidieuse complicité des parents, les effets de mode et en appeler à l’intangible différence des sexes … au nom de la défense du bien de l’enfant.
C’est oublier qu’il s’agit d’accompagner et d’écouter les enfants et leurs parents sans idées préconçues et sans a priori, autant que faire se peut sans jugement, pour que quelque chose d’un désir puisse s’élaborer, en prenant le temps.
Bien sûr, si l’on considère infréquentables toutes les avancées sociétales parce que issues de l’ordre capitaliste, alors, il n’y a de place que pour le scandale, la dénonciation du pouvoir des lobbies pharmaceutiques et du monde de l’argent, et au final le rejet et l’opprobre sur des possibles qui rendent parfois, la vie plus supportable.
Peut-on juste se rappeler que, certains enfants enfermés dans le genre auquel ils sont assignés à la naissance n’ont pour autre possibilité que de se soumettre, désespérés, à une norme sociale genrée, la psychanalyse devrait-elle en être la complice ? Elle sait combien cela fomente la haine de soi et des autres. « Tu seras un homme ou une femme, mon fils, ma fille… ». Seulement voilà… L’inconscient ruse, bouge, regorge d’inventivité. Il réinvente ses propres codes et sa propre logique. Il se convoque autant dans les esprits que dans les corps, mettant à sac les certitudes d’hier.
Le patriarcat hétérosexuel s’essouffle et avec lui, sa somme de poncifs éculés. Et puis, quoi ? Pointer les dangers que cette vitalité désirante soit récupérée par la vaste escroquerie capitaliste (le même capitalisme qui a déjà récupéré tant d’aspects de l’ordre établi) ? Par le discours de la science annihilant le sujet ? La défense n’a jamais été une voie de dégagement. Il s’agit d’avancer, à tâtons, vers une société encore aveuglée, peut-être titubante, mais vivante autrement.
Mais de quel ordre parle-t-on ? De celui qui crée tant de ravages identitaires dans les cours de récréation ? De celui qui rejette le féminin et soutient un patriarcat tout puissant ? De celui qui entraîne à l’errance et au suicide une cohorte de jeunes adolescents LGBTQIA+ ? On connait la prévalence du suicide chez ces jeunes. Les études pointent les causes, et notamment, une impossible identification à une norme sociale genrée, imposée, dans laquelle ils ne se retrouvent pas ou plus.
La psychanalyse toujours transgressive et toujours à l’écoute du désir doit pouvoir écouter les sujets contemporains et non se perdre dans la défense dépassée d’un appareillage théorique, qui ne peut être, le livre saint intouchable d’une religion. Elle se doit de rester, bien entendu, prudente et questionnante mais surtout vivante et ouverte à la suite des travaux de ses fondateurs Freud et Lacan, et de toutes celles et ceux qui l’ont fait avancer dans leurs sillages.
Nous appelons les associations de psychanalyse à ouvrir débats et discussions sur ces sujets contemporains, sans a priori et sans réponses toutes faites.
Par :
Joseph Agostini, Psychanalyste
Marc Antoine Bourdeu, Psychanalyste
Cosigné.e.s par :
Marie-Laure Peretti, Psychanalyste, Psychologue clinicienne
David Malinovski, Psychothérapeute, Psychologue clinicien
Mireille Rodriguez, Psychothérapeute, Psychologue clinicienne
Stathis Mermigkis, Psychanalyste, Psychologue clinicien
Olivier Pradel, Gestalt-praticien
Alexandre Saint Jevin, Dr. en Psychanalyse, Psychologue clinicien
Pascal Pomès, Psychanalyste
Anita Lenglet, Psychanalyste
Sophie Charnois, Psychanalyste, psychologue clinicienne
Teodor Kotov, Psychanalyste
Loïc Roullaux, Psychanalyste, Analyste psycho-organique
Alexandra Croce, Psychologue clinicienne
Lionel le Corre, Psychanalyste
Nicolas Rambourg, Psychologue clinicien, Psychanalyste
Géraldine Bray, Psychanalyste
Céline Jeanroy, Psychopraticienne
David Friboulet, Psychanalyste, Psychothérapeute
Gérard Seyeux, Psychanalyste
Marc Layani, Psychanalyste, Psychologue clinicien
Plus de cinquante militant·e·s, universitaires et praticien·ne·s de la santé mentale considèrent que le débat sur la question de l’accompagnement des mineur·e·s trans est posé sur des bases biaisées, car « l’incongruence entre le genre assigné et le genre vécu » est vu dans un prisme nécessairement pathologique. « Nous militons pour la liberté d’explorer des enfants et des adolescent·es trans. Nous militons pour leur protection, leur respect et le droit à leur auto-détermination ».
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Lien vers la tribune.
L'association PSY.gay.e.s soutient l'initiative #MeTooGay permettant de dénoncer les violences sexuelles commises sur la minorité LGBTQIA+ et demeurées le plus souvent impunies, voire invisibles.
Depuis le 21 janvier, ce hashtag permet à des milliers de personnes d'exprimer des agressions passées ou actuelles.
Nous considérons primordial pour les victimes de ces agressions sexuelles de verbaliser leur vécu et de faire connaître leur mal être, souvent teinté de non-dit et d'omerta familiale. Nous rappelons que l'association propose à qui le souhaite une mise en contact par mail ou téléphone avec un.e psychothérapeute et psychopraticien.ne de notre réseau, dans un accueil inconditionnel des personnes sans distinction d'orientation ou de genre.
Pendant la crise du Covid19, nombre de personnes peuvent rencontrer des difficultés psychiques.
Certain.e.s membres de psy.gay.e.s ont décidé d'accompagner l'initiative de l'Enipse et de proposer une écoute bénévole.
En cas de besoin, n'hésitez pas à contacter le numéro suivant : 06 24.10.63.10